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Soleil de Lumière
24 septembre 2013

Maître Morya - Partie 13 - Conversation sur la musique ancienne de l’Inde et de la Chine.

El_Morya_photo

 

Partie 13

Les vues du Thâkur sur la musique.

Conversation sur la musique ancienne

de l’Inde et de la Chine.

La vérite dans la mythologie.

Conception vedantique de l’homme

  

Comme le Thakur nous l’avait dit auparavant, les feux s’allumèrent les uns après les autres tandis que les silhouettes noires des adorateurs se mouvaient sur la rive opposée. Leurs chants sacrés mêlés d’exclamations primitives

« Hari, Hari, Mahâdeva » (Hari est l’un des noms de Shiva et Mahâdeva signifie le grand Dieu) résonnaient avec une intensité étrange et une sauvage ardeur dans l’air pur de la nuit. Les roseaux, secoués par le vent, leur répondaient par de tendres phrases musicales.

Tout cet ensemble remuait dans mon âme un vague sentiment de malaise, une étrange intoxication qui m’envahissait graduellement et dans ce lieu enchanteur, le culte idolâtre de ces âmes passionnées, poétiques, plongées dans les ténèbres de l’ignorance, semblait plus intelligible et moins répulsif. L’hindou est un mystique né, et la nature luxuriante de son pays a fait de lui un zélé panthéiste.

Les sons de l’algujâ, une sorte de flûte de Pan à sept tubes, frappèrent notre attention ; sa musique nous était apportée très distinctement par le vent de quelque part dans le bois. Elle intrigua aussi toute une famille de singes nichée dans les branches d’un arbre au-dessus de nos têtes. Deux ou trois de ses membres descendirent avec précaution et regardèrent autours d’eux comme s’ils eussent attendu quelque chose.

« Quel est ce nouvel Orphée à la voix de qui répondent les singes » demandai-je en riant.

« Quelque fakir probablement. L’algujâ est généralement employée pour inviter les singes sacrés à prendre leur repas. Les fakirs qui habitaient autrefois cette île se sont établis dans une vieille pagode de la forêt. Ce nouvel asile leur rapporte plus de profit, du fait qu’il y a plus de passage, et c’est pourquoi, ils quittèrent l’île… ».

« Ils ont probablement été contraints de déserter cet abominable endroit par peur de devenir complètement sourds ». Miss X exprima ainsi son opinion.

« A propos d’Orphée, dit le Takûr, savez-vous que la lyre de ce demi-dieu grec ne fut pas la première à jeter son charme sur les gens, les animaux et même les rivières ? Kui (Quelle curieuse coïncidence ! Cui est le nom d’un musicien réputé à Saint-Pétersbourg ; mais ni les animaux ni les personnes n’ont dansé sur sa musique). Un certain artiste-musicien chinois, qui vécu 1000 ans avant l’ère décrite à Orphéus, s’exprime d’une façon assez analogue : « quand je joue de mon Kyng, les animaux sauvages s’empressent vers moi, se mettent en rang, fascinés par la mélodie ».

« Où avez-vous lu cela ? »

« Ho, ce n’est pas un enseignement secret, certains de nos orientalistes occidentaux l’ont dit dans leurs livres, quoi que, personnellement, je l’ai lu dans un ancien livre sanscrit, traduit du chinois au IIème siècle avant notre ère.

Mais l’original se trouve dans un livre très ancien intitulé « Le gardien des cinq vertus cardinales ». C’est une sorte de chronique ou de traité sur le développement de la musique en Chine, écrit par ordre de l’empereur Hoang-Tee bien des années avant notre ère ».

« Pensez-vous que les chinois aient jamais compris quelque chose de la musique ? » dit le colonel, avec un sourire d’incrédulité. « En Californie et autres lieux, j’ai entendu des artistes ambulants du Céleste Empire… Et bien je pense que leur musique rendrait fou n’importe qui ».

« C’est exactement l’opinion de bien des musiciens occidentaux sur notre musique aryenne ancienne, aussi bien que sur notre musique hindoue moderne.

Mais, en premier lieu, l’idée de mélodie est complètement arbitraire ; et en deuxième lieu, il y a une grande différence entre la connaissance technique de la musique et la création de mélodies propres à plaire aux personnes cultivées et aux oreilles non exercées. Un morceau de musique peut être parfait selon les techniques, malgré que sa mélodie soit au-dessus de la compréhension d’un goût non développé, ou soit même déplaisante. Vos opéras les plus renommés nous donnent l’impression d’un sauvage chaos, comme une course de sons stridents, enchevêtrés, dans lesquels nous ne voyons aucune signification et qui nous donne mal à la tête. J’ai été à l’opéra à Londres et à celui de Paris ; j’ai entendu Rossini et Meyerbeer ; j’avais décidé de me rendre compte de mes impressions et j’écoutais avec beaucoup d’attention mais j’avoue que je préfère la plus simple de nos mélodies indigènes aux productions des meilleurs compositeurs européens. Nos chansons populaires me disent quelque chose, tandis qu’elles ne parviennent pas à éveiller de l’émotion chez vous. Mais, laissant les airs et les chansons de côté, je puis vous assurer que nos ancêtre, de même que les ancêtres des chinois, étaient loin d’être inférieurs aux européens modernes, sinon en instrumentation technique, du moins dans leurs notations arbitraires de la musique ».

« Les nations aryennes de l’antiquité, peut-être ; mais je crois difficilement que ce soit le cas des chinois touraniens », dit notre président d’un air dubitatif.

« La musique de la nature a toujours été le premier pas vers la musique de l’artiste. C’est une règle universelle, mais il y a diverses façons de s’y conformer.

Notre système musical est le plus grand de tous les arts si, pardonnezmoi ce paradoxe apparent, éviter tout artifice est de l’art. Nous n’admettons pas dans nos mélodies des sons qui ne puissent être classés parmi les voix vivantes de la nature ; alors que les tendances chinoises modernes sont tout à fait différentes. Le système musical des chinois comprend huit tons principaux qui servent de diapasons pour tous les tons dérivés qui sont par la suite classifiés sous les noms de leurs générateurs. Ces huit sons comprennent les notes du métal, de la pierre, de la soie, du bambou, des calebasses, des vases en terre, du cuir et du bois. De sorte qu’il y a chez les Chinois des sons métalliques, des sons de bois, des sons de soie, etc. Naturellement, dans ces conditions, il n’est pas possible de produire des mélodies ; leur musique consiste en une série enchevêtrée de notes séparées. Leur hymne impérial, par exemple, est une série d’accords qui ne finissent jamais.

Mais nous autres, Hindous, nous devons notre musique uniquement à la nature vivante, et nullement aux objets inanimés. Au sens le plus haut du mot, nous sommes panthéistes, et par la suite, notre musique est, pour ainsi dire, panthéiste ; mais en même temps, elle est hautement scientifique.

Venant du berceau de l’humanité, les races aryennes, qui furent les premières à atteindre l’humanité, écoutèrent les voix de la nature et conclurent que la mélodie, ainsi que l’harmonie, sont toutes deux contenues dans notre mère commune, la Nature. Celle-ci n’a pas de notes fausse ou artificielle ; et l’homme, couronnement de la création, sentit le désir d’en imiter les sons.

Dans leur multiplicité, tous ces sons, selon l’opinion de certains de vos physiciens occidentaux, forment une note unique, que nous pouvons entendre, si nous savons écouter, dans le bruissement éternel du feuillage des grandes forêts, dans le murmure de l’eau, dans le rugissement de l’océan en fureur, et même dans la rumeur lointaine des grandes villes. Cette note est le fa moyen, la note fondamentale de la nature. Dans nos mélodies, elle sert de point de départ, nous l’incorporons dans la clé, et autours d’elle se groupent les autres sons. Ayant remarqué que toutes les notes musicales ont leurs représentations caractéristiques dans le règne animal, nos ancêtres trouvèrent que les sept tons principaux correspondent aux cris de la chèvre, du paon, du boeuf, du perroquet, de la grenouille, du tigre et de l’éléphant. C’est ainsi que fut découverte et formée l’octave. Quant à ses subdivisions et mesures, elles trouvent aussi leur base dans les sons complexes émis par ces mêmes animaux ».

« Je ne suis pas juge de votre ancienne musique, dit le colonel et je ne sais pas non plus si vos ancêtres ont ou n’ont pas élaboré des théories musicales, de sorte que je ne puis vous contredire ; mais je dois vous avouer qu’en écoutant chanter les Hindous modernes, je n’ai pu leur reconnaître de connaissances musicales ».

« Cela est sans doute du à ce que vous n’avez jamais entendu des musiciens professionnels. Quand vous aurez visité Poona et aurez écouté le Gayan Samaj, nous continuerons notre conversation d’à présent. Le Gayan Samaj est une société dont le but est de rénover l’ancienne musique nationale ».

« Vous êtes injuste », interrompit soudain le Babu. La musique des anciens est sans doute une plante antédiluvienne, mais néanmoins elle mérite d’être étudiée et vaut d’être prise en considération. La chose est bien prouvée maintenant par l’un de mes compatriotes, le Raja Surendronath Tagor… C’est un Dr. Es-musique, il a reçu nombre de décorations de rois et d’empereurs d’Europe pour son livre sur la musique des aryens… Eh bien, cet homme a prouvé clair comme le jour, que l’Inde antique a le droit d’être appelée la mère de la musique. Les meilleurs critiques d’Angleterre eux-mêmes le disent ! Toutes les écoles de musique, soit italienne, allemande ou aryenne, ont vu le jour à certaines périodes, se sont développées sous un certain climat et dans des circonstances bien différentes. Chaque école à ses caractéristiques, son charme particulier, tout au moins pour ses adeptes ; et notre école indienne n’est pas une exception. Vous autres, Européens, êtes habitués aux mélodies de l’Occident, et connaissez les écoles occidentales de musique ; mais notre système musical, comme tant d’autres choses aux

Indes, vous est totalement inconnu. Aussi excuserez-vous ma hardiesse, colonel, quand je vous dis que vous n’avez pas le droit de la juger ! »

« Ne vous échauffez pas, Babu, dit le Takûr, tout le monde a le droit, sinon de discuter, tout au moins de poser des questions concernant un nouveau sujet. Autrement, il serait impossible d’obtenir des informations. Si la musique hindoue appartenait à une époque aussi peu éloignée de nous que celle des Européens, ce que vous semblez suggérer, Babu, dans votre hâte, et si, en outre, elle possédait toutes les vertus de tous les systèmes musicaux précédents, que la musique européenne s’est assimilée, elle serait sans doute mieux comprise et mieux appréciée qu’elle ne l’est. Mais notre musique appartient aux temps préhistorique. Dans un sarcophage de Thébes, Bruce a découvert une harpe à 20 cordes et, à en juger par cet instrument, nous pouvons dire avec assurance que les anciens habitants de l’Egypte étaient bien au courant des mystères de l’harmonie. Mais, à l’exception des égyptiens, nous étions le seul peuple en possession de cet art, aux temps reculés, alors que le reste de l’humanité était encore en train de lutter contre les éléments pour assurer son existence. Nous possédons des centaines de manuscrits sanscrits sur la musique, qui n’ont jamais été traduits, même dans les dialogues hindous modernes. Certains d’entre eux ont quatre ou huit mille ans d’ancienneté. Quoi que puissent dire vos orientalistes, nous persisterons à croire à leur antiquité, parce que nous les avons lus et étudiés, alors que les savants européens n’y ont pas encore jeté les yeux.

Il y a un grand nombre de ces traités musicaux, et ils ont été écrits à diverses époques ; mais tous, sans exception, montrent qu’aux Indes la musique était connue et systématisée à des époques où les nations actuellement civilisées d’Europe vivaient encore comme des sauvages. Mais tous ces faits ne nous donnent pas le droit de nous indigner quand vous n’aimez pas notre musique, puisque vos oreilles n’y sont pas habituées et que votre cerveau ne peut en comprendre l’esprit…

Dans une certaine mesure nous pouvons vous expliquer son caractère technique et vous donner une idée exacte de son aspect scientifique. Mais personne ne peut créer en vous, en un instant, ce que les Aryens appelaient Rakti, l’aptitude de l’âme humaine à saisir les combinaisons des divers sons de la nature et à ressentir les émotions qu’ils provoquent. Cette aptitude est l’alpha et l’oméga de notre système musical, mais vous ne la possédez pas, de même que nous ne possédons pas l’aptitude à tomber en extase devant les oeuvres de Bellini ».

« Mais pourquoi en serait-il ainsi ? Que sont les vertus mystérieuses de votre musique, qu’elle ne puisse être comprise que par vous ? Nos épidermes sont de couleurs différentes, mais notre mécanisme organique est le même. En d’autres termes, les combinaisons physiologiques d’os, de sang, de nerfs, de veines et de muscles, qui forment un Hindou, ont d’autant de parties et sont combinées exactement d’après le même modèle que l’organisme d’un Américain, d’un Anglais ou même de tout autre Européen. Tous viennent au monde dans le même laboratoire de la nature ; ils ont le même commencement et la même fin. Au point de vue physiologique, nous sommes des duplicata les uns des autres ».

« Physiologiquement, oui, et il en serait de même psychologiquement si l’éducation n’intervenait pas, laquelle éducation ne peut, somme toute, manquer d’influencer la direction mentale et morale dans laquelle se dirige l’être humain. Parfois, elle éteint l’étincelle divine ; d’autres fois elle l’avive, la transformant en un phare qui devient l’étoile directrice de l’homme pendant sa vie ».

« Sans doute la chose est vraie. Mais l’influence qu’a l’éducation sur la physiologie de l’oreille ne peut être aussi importante que vous voulez bien le dire ».

« Tout au contraire. Pensez à la forte influence que les conditions climatiques, le régime, l’entourage journalier ont sur la pigmentation de la peau, la vitalité, les fonctions de reproductions, etc., et vous verrez que vous avez tort. Appliquez la même loi de modifications graduelles au problème purement psychique en l’homme, et les résultats seront identiques. Modifiez l’éducation et vous changerez les capacités d’un être humain.

Par exemple, vous croyez à l’influence de la gymnastique, vous croyez que des exercices appropriés peuvent presque transformer le corps humain. Nous ferons un pas de plus. L’expérience des siècles montre qu’il y a pour l’âme une gymnastique comme pour le corps. Mais la gymnastique de l’âme est notre secret. Qu’est-ce qui donne au marin un coup d’oeil d’aigle, à l’acrobate l’agilité du singe, au lutteur des muscles d’acier ? L’exercice et l’habitude.

Pourquoi donc ne pas croire que l’âme de l’homme a les mêmes possibilités que son corps ? Peut-être par la faute de la science moderne, qui fait totalement abstraction de l’âme, ou qui ne voit pas en elle une vie distincte de la vie du corps… ».

Source : K.P.Kumar

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